Fukushima : Les aveux de Tepco. Mais que cachent ces aveux?
Une nouvelle catastrophe est-elle à craindre sur Fukushima?
Centrale atomique de Fukushima, Tohoku, Japon
Retour sur les événements. Il existait une "peur latente d'une fermeture de la centrale de Fukushima jusqu'à ce que des mesures draconiennes de sécurité soient mises en place" écrit Tepco dans un rapport-confession de 32 pages intitulé "Politique fondamentale pour la réforme du dispositif nucléaire de Tepco" plus d'un an et demi après l'accident. Tepco avoue avoir négligé les risques d'un accident nucléaire ou d'une catastrophe naturelle.
Ce rapport de 32 pages indique qu'avant même le tsunami géant de mars 2011 qui a submergé la centrale, la compagnie savait que les systèmes de défense et de protection étaient insuffisants. Elle n'avait toutefois pas agi, probablement par peur des coûts que cela allait représenter. "Il y avait cette inquiétude que si de nouvelles et sévères mesures étaient imposées, cela provoquerait une préoccupation sur la sûreté de toutes les centrales existantes", et pourrait "donner plus de vigueur au mouvement antinucléaire." Tepco craignait de devoir renforcer la sécurité des installations nucléaires japonaises. Tepco n'était pas prêt à payer ou à entreprendre un retour en arrière sur sa stratégie industrielle. Mais...
-En décembre 2011, Tepco avait toutefois fait un premier mea culpa dans un rapport dans lequel la compagnie soulignait l'insuffisance de sa préparation.
-En juillet 2012, le rapport parlementaire présidé par le Dr. Kurokawa de l'Université de Tokyo attaque bille en tête le système culturel japonais de collusion et la paralysie du système en même temps que la dépendance des autorités locales. Un nouveau rapport, officiel cette fois, mettait sévèrement en cause le gouvernement et Tepco, fustigeant leur aveuglement face aux risques et leurs erreurs : "le principal problème provient du fait que les compagnies d'électricité, dont Tepco, et le gouvernement n'ont pas perçu la réalité du danger, car ils croyaient au mythe de la sûreté nucléaire au nom duquel un accident grave ne peut se produire dans notre pays".
Consécutif à un séisme de magnitude 9 et à un tsunami géant, l'accident de Fukushima, le pire depuis celui de Tchernobyl (Ukraine) en 1986, avait provoqué d'importantes émissions radioactives dans l'air, les eaux et les sols de la région de la centrale, située à 220 km au nord-est de Tokyo. Une centaine de milliers de personnes ont dû quitter leur domicile.
Les autorités japonaises ont depuis complètement changé leur politique à l'égard de l'énergie nucléaire: alors qu'avant l'accident elles envisageaient d'augmenter la production, elles ont annoncé à la mi-septembre vouloir sortir progressivement et totalement du nucléaire d'ici à trente ans. Sans qu'ait été précisé comment concrètement compenser l'arrêt du nucléaire, trois principes ont été édictés : arrêter les réacteurs déjà en service au bout de 40 ans d'existence, n'accepter le redémarrage des réacteurs dont le fonctionnement est suspendu qu'après des examens concernant leur sûreté, et ne plus construire de centrales.
Mais le problème majeur aujourd'hui concerne la décontamination et l'élimination des déchets nucléaires. A ce jour il n'existe aucune position clairement définie par le gouvernement japonais. L'un des responsables de la nouvelle autorité de régulation du nucléaire m'a confié "off" que le Japon est en
totale contradiction avec sa politique nucléaire annoncée. Tokyo déclare avec effets de manches qu'il entreprend sa sortie du nucléaire "dans les 30 ans" mais ne dit rien de ce qu'il va faire de ses innombrables tonnes de déchets radioactifs, comment les retraiter, et de ce que le Japon fera une fois le retraitement de ces déchets accompli. Quel usage?
En outre les réacteurs nucléaires japonais ne sont pas stabilisés, les émanations se poursuivent. D'autres catastrophes en puissances sont redoutées en raison du positionnement de ces centrales sur des failles sismiques. Le silence des autorités sur les 257 tonnes de Corium atteint des sommets d'irresponsabilités alors que des technologies existent ailleurs pour déterminer sa location, par les Gamma par exemple, le Corium comporte des radionucléides émetteurs de rayonnement Gamma, mais rien n'est révélé sur leur présence (sauf si le Corium a bien pénétré les enveloppes des réacteurs depuis le printemps 2011, en Mai 2011 par exemple). Un silence bien bruyant.
Tepco continue par conséquent et malgré ses aveux de négligence criminelle, de jouer son rôle de Shogoun du nucléaire alors que mois après mois des pans entiers de l'opacité du village nucléaire nippon explosent au grand jour. Les rapports officiels, les médias, la société civile. Le nucléaire et le triangle de fer demeurent néanmoins les meilleurs alliés que le Japon ait produit depuis 50 ans (Bureaucracy and Iron Triangle).
Reste donc une inconnue, le Japon a-t-il des ambitions militaires recourant au nucléaire? Des experts parlent d'une période de 3 semaines pour créer ces armes nucléaires dans les laboratoires militaires du Japon et pour disposer d'une force de frappe considérable en raison des quantités de plutonium accumulées par le Japon et l'industrie nucléaire japonaise aidée en cela par ses partenaires industriels et commerciaux francais. La France qui entretient les mêmes relations commerciales avec d'autres pays de la région asiatique et en particulier… avec la Chine avec laquelle le Japon est en querelle récurrente depuis près d'un siècle! La dernière étant cette bataille navale liée aux querelles territoriales des iles Senkaku Diaoyu en Mer de Chine.
Qu'en adviendra-t-il? L'Asie de l'Est a-t-elle dépassée les bornes du raisonnable et est-elle en voie de durcissement politique? Une nouvelle guerre froide? Trop tôt pour le dire.
Mon reportage sur RTL France dans la matinale de Bernard Poirette du 13 Octobre. Journal de 08:30.
http://lnk.nu/rtl.fr/272b